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Contraintes et perspectives de développement pour l’Agriculture Méditerranéenne

Les ressources naturelles en Méditerranée: des handicaps importants et des situations très contrastées

Les ressources naturelles en Méditerranée: des handicaps importants et des situations très contrastées

La région est fortement hétérogène au niveau de son potentiel agricole, du fait de reliefs variés, de variétés climatiques engendrant des ressources inégales en eau et des potentialités des sols très variables.

Un des principaux handicaps de la région est la disponibilité de la ressource en eau, «La région méditerranéenne ne dispose que de 3 % des ressources en eau du monde, alors qu’elle rassemble 7,3 % de l’Humanité. Près de 60 % des habitants de la planète qui sont pauvres en eau, c’est-à-dire qui disposent de moins de 1 000 m³ de ressource annuelle per capita, se concentrent dans les seuls pays méditerranéens du Sud et du Proche-Orient » (PNUE-PAM-Plan bleu, 2004).

Les apports pluviométriques annuels sur le bassin méditerranéen sont estimés aux environ de 1100 milliards de M3 dont les deux tiers sont apportés sur moins de un tiers de la surface.

Tableau 1: Les apports pluviométriques annuels sur le bassin méditerranéen (Milliards de M3)
Milliards M3  %
Rive Nord 765 71
Rive Sud 145 13
Est 171 16

Source: PNUE/PAM MAP Technical Reports Series, n°158, 2004

Ces seules informations font apparaître les fortes disparités existant entre le Nord du bassin méditerranéen et le Sud et l’Est en terme de ressource en eau.

Sur des apports pluviométriques moyens d’environ 1 100 milliards de mètres cube, près de 560 milliards n’engendrent pas d’écoulement – il s’agit de l’eau verte qui équivaut à l’évapotranspiration réelle – et seuls 300 milliards sont utiles pour la végétation naturelle et cultivée; là encore la variabilité intra-régionale est grande avec une répartition du disponible de 210 Milliards de M3 pour le Nord, 50 pour l’Est et 40 au Sud. L’écart entre les besoins des cultures et «l’eau verte» permet d’approcher le besoin d’irrigation, qui varie énormément d’une rive à l’autre.

Ainsi, au nord du bassin, l’eau verte disponible dépasse souvent 500 mm même si, dans certaines régions, elle peut varier entre 200 et 300 mm. Au Maghreb, elle varie de 500 mm à moins de 100 mm, avec une très forte variabilité inter annuelle. Quant à l’est, une majorité du territoire reçoit moins de 100 mm. Sachant que le besoin d’irrigation devient incontournable en dessous de 300 mm et parfois en dessous de 500 mm pour certaines cultures, on mesure l’importance des besoins, d’autant que ce déficit volumétrique s’accompagne d’une grande variabilité intra annuelle et inter annuelle.

Les Eaux bleues sont les précipitations génératrices d’écoulement superficiel ou souterrain et les apports extérieurs avec une moyenne annuelle de 620 Km3, 80 % sont concentrés sur la Nord et la Turquie (496 Km3/an) et 20% (124 Km3/an) se répartissent sur le Sud et le Proche Orient ou le Nil apporte à lui seul plus de 13 % (80,6 Km3/an).

Les ressources exploitables peuvent être réparties en deux grands types:

Des ressources régulières avec pour les eaux de surface 60 Milliards de M3 et 50 Milliards de M3 pour les eaux souterraines . Nous avons ensuite des ressources de surface irrégulières avec 240 Milliards de M3 (dont Nil 50). Le total théoriquement disponible serait d’environ 350 Milliards de M3 mais avec presque 70 % de ces ressources ayant un caractère irrégulier.

Face à cette situation de variabilité spatiale, intra annuelle et inter annuelle de la ressource en eau, les méditerranéens ont depuis plusieurs millénaires cherchés à mobiliser et sécuriser la ressource en eau par des aménagements hydrauliques. «Déjà, au début de notre ère, la civilisation nabatéenne avait brillamment réussi à convoyer l’eau vers des zones agricoles sises dans l’actuel désert de Judée. A la même période, les Romains faisaient également valoir leurs compétences en matière d’adduction d’eau. Plus tard, alors qu’ils avaient unifié les territoires à l’est et au sud de la Méditerranée, les Arabes conçurent des ouvrages de retenue et d’amenée d’eau qui forcent encore l’admiration. La route de l’eau édifiée sous le calife Haroun el Rachid, destinée à désaltérer les pèlerins de Bagdad à La Mecque, en est un exemple patent, de même que le sont les réseaux d’irrigation installés dans la région de Marrakech, sous les dynasties Almohaves et Almoravides (El Faiz, 2005) » (Blanc, Le Grusse, 2007).

Après des siècles sans évolution majeure, la demande en eau a presque doublé dans la seconde moitié du XXème siècle, avec une augmentation de 50 % dans les 25 dernières années caractérisée toujours par un important déséquilibre avec 70 % d’augmentation de la demande pour le Sud et l’Est durant la même période.

La demande totale s »établit autour de 190 Milliards de M3, les volumes utilisés seraient 150 Milliards de M3 et la consommation nette finale de l’ordre de 90 à 100 Milliards. On peut donc constater que les ressources régulières en eau ne peuvent couvrir la demande, le stockage s’avère donc obligatoire pour assurer l’offre sur des fluctuations inter-annuelles.

Cette évolution est la résultante de nombreux facteurs ; une augmentation démographique, un développement du tourisme sur le pourtour méditerranéen, un développement industriel et des usages hydroélectriques. Les besoins en eau se sont aujourd’hui ainsi diversifiés entraînant des conflits d’usages et des arbitrages d’allocation le plus souvent au détriment de l’agriculture.

Tableau 2: Répartition de la demande en eau par secteur
Secteur d’activité Pays riverains (%) Espace méditerranéen des pays riverains (%)
Eau potable tourisme 13 13
Irrigation 62 64
Industrie 11 10
Hydroélectricité 13 11

Source: PNUE/PAM MAP Technical Reports Series, n°158, 2004

Si l’agriculture est souvent la secteur d’ajustement par rapport aux autres secteurs dans l’allocation de la ressource en eau, la rareté de la ressource pose dans de nombreuses situations un problème d’approvisionnement en eau potable pour des populations toujours plus nombreuses, ceci associé à une forte urbanisation essentiellement concentrée sur le littoral. Depuis le milieu du XXème siècle les Etats se sont lancé dans de grands ouvrages de stockage d’eau, pour satisfaire une demande ne pouvant plus s’accommoder des ressources traditionnelles. On recense ainsi plus de 500 grands barrages dans le bassin méditerranéen avec une capacité de stockage théorique de 230 Milliards de M3.

Aujourd’hui dans de nombreuses régions du sud, toutes les possibilités de mobilisation de la ressource ont été atteintes. Des politiques de transfert d’eau voient ainsi le jour pour alimenter les zones les plus déficitaires. Le développement des capacités individuelles de pompage grâce notamment à l’électrification et les pompes immergées permettent aux agriculteurs d’exploiter les nappes de manière intensive. De nombreuses nappes sont sur-exploitées et en danger. Nous ne ferons ici qu’évoquer les pompages dans des nappes fossiles qui ne seront bien évidemment pas durables.

La gestion par l’offre semble arriver à des limites; des solutions comme la réutilisation des eaux usées et les dessalement de l’eau de mer apparaissent comme des solutions alternatives malgré les limites sanitaires et énergétiques, ainsi que les limites quantitatives de ces solutions par rapport aux besoins. La possibilité de mobiliser de nouvelles ressources existe mais à des coûts souvent très élevés. La gestion de la demande, avec l’amélioration de la productivité de l’eau en agriculture est aujourd’hui l’objectif premier des politiques hydrauliques. Sera t il possible de relever les défis de besoins en eau pour les productions agricoles pour les décennies à venir en combinant ces différents leviers ?.

La limitation des surfaces exploitables et la qualité des sols dans le bassin méditerranéen sont également des facteurs de contrainte important pour le développement de la production agricole. Au niveau de la qualité des sols la variabilité est également très grande en méditerranée; les zone arides du sud avec des températures élevées et de faibles précipitations qui rendent difficiles la pédogenèse ont souvent des sols squelettiques impropres à l’agriculture (Mediterra, 2008). Le développement des zones urbaines, souvent au niveau des plaines du littoral vient amputer la région des meilleures terres agricoles.

Le développement de nouvelles surface agricoles reste marginal et nécessite des ressources en eau (Développement de nouvelles terres dans le désert en Egypte).

Tableau 3: Superficies agricoles dans le monde et en méditerranée
2003 Sup Totale Sup agricole %Sup agricole/Sup Totale
1000 ha
Monde 13432420 4973406 37
Méditerranée 871932 255006 29
Médit Nord 265993 140216 53
Union Eur 158215 87128 55
Médit Sud 605939 114790 19

Source: nos calcul à partir de Médagri CIHEAM-IAMM, 2006

Seulement 37 % de la superficie total des terres du monde sont utilisables en terme agricole; en méditerranée la proportion tombe à moins de 30 % et la différence la plus importante se trouve entre la rive Nord largement dotée en potentiel d’exploitation des terres avec plus de 50% des surfaces alors qu’au Sud le potentiel est inférieur à 20%. L’inégalité est très significative.

Tableau 4: Superficies cultivées (Superficies arables et cultures permanentes)
2003 (1000 ha) Sup. agricole  Sup. Arables et CP  %Sup Arables et CP sur Surf. agricole 
       
Monde 4973406 1540572 31
Méditerranée   255006 123863 49
Médit. Nord   140216 89206 64
Union Eur    87128 55127 63
Médit. Sud 114790 34657 30

Source: nos calcul à partir de Médagri CIHEAM-IAMM, 2006

En Méditerranée, 49 % des superficies agricoles sont cultivées, les reste des surfaces est occupée par des zones de pâturage . Dans le monde cette proportion est d’environ 30 % avec encore d’importantes différences entre la rive Nord avec plus de 60% et la rive Sud avec seulement 30%.

Au contraintes climatiques et de ressource en eau du Sud de la méditerranée s’ajoute donc des contraintes de rareté des terres agricoles exploitables.

Activités du projet ConserveTerra

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