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mardi, octobre 15, 2024

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Qualité globale du lait cru de vache au Maroc Concepts, état des lieux et perspectives d’amélioration

Comment les conditions de traite affectent-elles la qualité hygiénique du lait ?

Les résultats précédents indiquent que la variabilité de la qualité globale du lait, en conditions marocaines, est surtout déterminée par les critères hygiéniques, dont les déterminants sont avant tout au niveau des pratiques de traite et d’hygiène adoptées par les éleveurs.

En vue de préciser davantage les relations entre ces pratiques et la qualité hygiénique du lait, une troisième étude été conduite. Elle s’est focalisée sur une caractérisation de la qualité hygiénique du lait en y adjoignant la flore pathogène représentée par les staphylocoques et Salmonella sp. Par ailleurs, une caractérisation des pratiques de traite a été réalisée, notamment en tenant compte de l’allaitement des veaux préalablement à la traite et ses conséquences possibles sur la qualité du lait.

L’étude a concerné 109 étables et été conduite dans la région de Rabat-Salé Zemmour Zaër, au cours du printemps 2005.

Les résultats ont montré que le lait collecté avait un pH moyen de 6,84 et à une température moyenne de 13,4 °C. Le dénombrement moyen de la FMAT dans le lait était de 42,4 x 106 ± 200,2 x 106 UFC/ml, ce qui témoigne de sa très forte variabilité. Les échantillons les moins contaminés présentaient une valeur minimale de 1,3 x 104 UFC/ml. Les plus sales avaient une valeur de 1,5 x 109 UFC/ml (Tableau 3, voir fichier PDF).

La même variabilité a été observée pour les coliformes totaux avec une valeur moyenne de 4,1 x 105 UFC/ml. Certains échantillons (n = 26) ne présentaient pas du tout de coliformes tandis que la valeur maximale était de 20,8 x 106 UFC/ml. La même tendance a été observée pour les comptages des coliformes fécaux, avec une valeur moyenne de 80,3 UFC/ml. Finalement, en rapport aux bactéries présumées pathogènes, 76 échantillons sur les 109 analysés ne présentaient pas de contamination par les staphylocoques. La teneur moyenne dans les 33 échantillons contaminés était de 246 UFC/ml. Dans le même registre des pathogènes, aucun des échantillons analysés ne présentait de colonies caractéristiques de Salmonella sp.

Trois classes de qualité hygiénique du lait ont été distinguées par le recours à des méthodes statistiques multivariées. Á l’image des résultats des études précédentes, le critère FMAT n’était pas discriminant pour la constitution de ces classes, ce qui montre qu’actuellement en conditions d’élevage bovin au Maroc, le dénombrement de la flore totale du lait est insuffisant pour distinguer la qualité hygiénique du lait. Ceci est sûrement la résultante d’une situation où, dans la majorité des étables et indépendamment de leur taille, la FMAT est supérieure à la norme internationale de 105 UFC/ml. Il faut donc lui adjoindre des critères plus affinés tels que les coliformes totaux et encore plus les coliformes fécaux ou les pathogènes pour véritablement distinguer des classes de qualité hygiénique du lait différentes.

Aussi, dans ces trois classes, seules les contaminations en coliformes fécaux et staphylocoques étaient significativement différentes (tableau 4, voir fichier PDF). La classe numéro 1, avec 64 échantillons de lait, présentait les plus forts taux de contamination en coliformes fécaux (117 ufc/ml) et un score intermédiaire en staphylocoques (170 ufc/ml). La deuxième classe groupait 30 échantillons et montrait un score intermédiaire en coliformes fécaux (51 ufc/ml) et la plus forte teneur en staphylocoques (539 ufc/ml). Finalement, la dernière classe (15 échantillons) était caractérisée par l’absence de coliformes fécaux et par les plus faibles comptages en staphylocoques (123 ufc/ml).

La mise en relation des classes de qualité hygiénique du lait avec les pratiques d’élevage a nécessité de procéder à la caractérisation des conditions de conduite du cheptel bovin adoptées par les éleveurs. Un classement préalable, selon la chronologie des pratiques de traite, a permis une division en trois catégories distinctes:

 celles spécifiquement liées à l’hygiène de la traite (lavage des mains et des mamelles, lavage de la vaisselle, filtration du lait);
 celles renseignant sur la gestion de la qualité du lait au niveau de l’exploitation (temps écoulé entre la traite et la livraison du lait, type de vaisselle utilisée, et type de litière);
 celles reflétant le niveau d’intensification de la production (traite en présence du veau, traite manuelle ou mécanique, nombre de traites par jour et rendement laitier quotidien par vache).

Les résultats ont montré une dichotomie très claire entre les étables produisant en moyenne plus de 10 kg de lait quotidiens par vache traite et dans lesquelles des pratiques de traite relativement propres sont adoptées et des étables bien plus extensives (moins de 5 kg de lait par vache et par jour) où l’intérêt pour l’hygiène à la traite semble bien moindre.
L’usage d’outils multivariés a permis d’établir une typologie des profils de traite, avec 3 classes bien distinctes, qui peuvent être décrites comme suit:

 profil numéro 1, représenté par 45 étables, caractérisé par une seule traite quotidienne, entièrement manuelle, réalisée systématiquement en présence du veau, et par un lavage aléatoire des mains et des mamelles. L’intensification est faible (à peine 6,9 kg de lait par vache/jour);
 profil numéro 2, représenté par 39 étables, avec une à deux traites manuelles par jour, toujours en présence du veau et avec un lavage systématique des mains et mamelles. Le niveau d’intensification est intermédiaire (9,2 kg de lait par vache traite/jour);
 profil numéro 3 (25 étables), avec deux traites systématiques par jour en l’absence du veau et avec un lavage complet des mains et mamelles. Ce profil représente le plus haut degré d’intensification (11,8 kg de lait par vache traite/jour) et rassemble les deux exploitations pratiquant la traite mécanique.

Par la suite, les relations entre les profils de traite et la qualité hygiénique du lait cru ont été mises en évidence par le recours à des tableaux de contingence (Tableau 5, voir fichier PDF). Les résultats indiquent que les profils de traite ont induit des différences hautement significatives au niveau de la contamination du lait cru en coliformes fécaux et en staphylocoques, mais sans aucune influence sur la FMAT ou les coliformes totaux.

Ainsi, les contaminations les plus élevées en staphylocoques (échantillons de lait de la deuxième classe de qualité hygiénique) étaient associées (jusqu’à 50 %) au profil de traite numéro 3, qui semble être le plus propre (lavage systématique des mains et des mamelles en l’absence de veau allaitant). D’autre part, les plus faibles scores de contamination en staphylocoques (échantillons de lait de la troisième classe hygiénique) sont liés de manière similaire (à 46,7 % des cas) aux profils de traite 1 et 2, dont la caractéristique commune est la tétée du veau préalablement à la traite. Finalement, les échantillons de lait de la première classe hygiénique (plus forte contamination en coliformes fécaux) sont associés presque de manière identique aux profils de traite 1 et 2 (45 et 40 %).

Globalement, ces résultats tendraient à prouver que les pratiques de tétée préalables à la traite auraient pour incidence une chute de la contamination par les coliformes fécaux et les staphylocoques dans le lait, à la différence des étables sans tétée des veaux. Ces résultats s’accordent avec les observations de recherches antérieures qui démontrent que les premiers jets de lait sont les plus fortement contaminés en microorganismes présumés pathogènes, surtout en cas de mammites. La tétée préalable du veau, pratique largement établie dans les étables laitières du Maroc pour stimuler la traite et aussi pour favoriser la croissance des veaux, aurait ainsi comme conséquence annexe un abaissement de la contamination du lait par les coliformes fécaux et les staphylocoques. De plus, ces résultats indiqueraient aussi que, dans l’état actuel, en conditions d’élevage bovin classiques au Maroc, les pratiques de lavage antérieures à la traite n’auraient aucune incidence sur la contamination globale du lait (FMAT ou même coliformes totaux). Peut-être cela est-il dû à un lavage inefficient, pratiqué avec des lingettes ou des chiffons sales et une eau dont la qualité hygiénique est douteuse. Sans omettre que dans l’écrasante majorité des situations d’élevage, l’utilisation de détergents qui assureraient la désinfection du milieu ambiant (bâtiments, vaisselle laitière et mamelle) en contact avec le lait est inexistante.

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