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jeudi, avril 25, 2024

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Analyse fonctionnelle de la chaîne de valeur d’Argane de la province de Tiznit: Cartographie des maillons et des acteurs

Les activités et acteurs de la chaîne de valeur

Trois groupes d’activités ainsi que trois groupes d’acteurs se distinguent sur la chaîne de valeur de l’argane. En amont de la chaîne, se trouvent les activités de collecte des fruits dont les acteurs principaux sont les ménages. Au niveau des maillons intermédiaires, se situent les activités de transformation dans lesquelles participent les ménages, les coopératives et dans une moindre mesure, les commerçants. Ces trois acteurs sont également présents en aval de la chaîne, où s’opèrent les activités de commercialisation.

Les frontières entre ces différentes activités ne se sont pas souvent assez nettes, en passant d’un acteur à un autre. En effet, on retrouve certains acteurs qui interviennent, simultanément, sur un ou plusieurs maillons de la chaîne, rendant complexe la distinction des particularités inhérentes à chaque catégorie d’acteurs.

Activité 1: la collecte 

La principale activité en amont de la filière argane de Tiznit consiste en la collecte des fruits de l’argane. Cette opération est principalement réalisée par les ménages, composés majoritairement de femmes. La collecte des fruits de l’arganier est l’activité la plus importante de la chaîne de valeur puisqu’elle conditionne la disponibilité de la matière première pour l’ensemble de la filière. Sur le plan technique, la collecte des fruits est réalisée de manière manuelle par des ménages-usufruitiers qui sillonnent la forêt de l’arganier, dont ils ont le droit de jouissance pour cueillir, à coups de branche, les fruits d’argane. A ce niveau, la main d’œuvre est le plus souvent familiale. Cette opération est suivie du séchage manuel des fruits qui se tient, généralement, sur les toits ou sur les sols des habitations des ménages. Il s’en suit le stockage des fruits secs d’argane dans des sacs de 50 à 60 kg, qui sont entreposés dans les lieux d’habitation des ménages ou dans les bâtiments d’élevage. Ces fruits sont destinés à rentrer, en partie ou en totalité, dans le processus de transformation par les ménages eux-mêmes, ou par les commerçants ou les coopératives achetant ces fruits auprès des ménages. Ainsi, ces derniers sont considérés comme les principaux acteurs en amont de la chaîne de valeur de l’argane.

La plupart des ménages participant à la collecte des fruits de l’argane sont composés en moyenne, de 6 personnes par ménage. Cependant, il est important de souligner que la quantité des fruits collectée par les ménages varie considérablement en fonction de la densité des arganiers dont ils ont la jouissance, de l’âge des arbres, des conditions pédo-climatiques et bien d’autres facteurs.

En termes de destination, il est à noter que les ménages transforment, eux-mêmes, environ 75 % de leur production de fruits d’argane. Les 25 % restants sont vendus aux coopératives et aux commerçants/intermédiaires présents dans la province.

Tableau 1: Destination des fruits d’argane collectés par les ménages

Destination des fruits d’argane collectés par les ménages %
Auto-transformation par les ménages 75
Vente aux coopératives 15
Vente aux commerçants 9
Autres (vente à d’autres ménages, alimentation de bétails, etc.) 1

 

En fait, la qualité des fruits demeure le principal critère d’acceptation exigé par coopératives (taille spécifique, absence de taches blanches, etc.). Lors de la vente des fruits, les ménages s’attachent plus aux critères du prix et de la proximité, des liens familiaux et de la qualité des relations commerciales précédemment établies. En ce qui concerne les modes de paiement pratiqué sur ce maillon de la chaîne, plus de 95% des transactions sont faites avec un paiement direct de la totalité de la somme due.

Activité 2: la transformation

Les activités de transformation des fruits d’argane s’articulent autour de deux principales opérations distinctes, mais complémentaires. Il s’agit des opérations de transformation primaire et des opérations de transformation secondaire (Figure 2).

Ces deux opérations se succèdent pour aboutir à l’obtention de l’huile d’argane alimentaire et/ou cosmétique. La caractérisation des spécificités de ces opérations permet de cerner les tenants et les aboutissants du maillon intermédiaire de la chaîne de valeur de l’argane.

Les opérations dites de « transformation primaire » sont effectuées par les ménages et les coopératives et consistent à dépulper et concasser les fruits d’argane ayant été collectés par les ménages ou achetés par les coopératives. Ces dernières s’approvisionnent auprès des ménages ou des commerçants qui procurent les fruits, à leur tour auprès des ménages, pour les besoins de leurs activités de transformation. Les résultats de ces opérations sont les amandons (produits) et les pulpes et les coques (sous-produits).

Les acteurs intervenant sur ce maillon sont les ménages, les coopératives et les commerçants.

Les ménages

Il est à noter que la majorité des fruits transformés par les ménages est collectée par les ménages eux-mêmes. La quantité moyenne d’amandons produits par ménage est de 320 Kg/an. Ces amandons sont destinées aussi bien à la vente qu’à la transformation en huile d’argane. Les pourcentages correspondant aux différents postes de destination des amandons sont récapitulés dans le tableau suivant.

Tableau 2: Destination des amandons produits par les ménages dans la province de Tiznit

Destination des amandons produits par les ménages %
Auto-transformation 90
Vente aux coopératives 6
Vente aux commerçants 4

 

Les coopératives

Il existe, en somme, 36 coopératives d’argane dans la province de Tiznit dont la moyenne de leurs adhérents se situe autour de 20 personnes.

En ce qui concerne leur niveau technologique, il est à constater que peu de coopératives effectuent encore leurs activités de manière traditionnelle. La mécanisation a permis d’améliorer les niveaux de productivité sur la chaîne (66 % des coopératives de la province sont semi-mécanisées et ayant au plus 10 équipements[1] mécaniques différents).

Au regard des quantités de fruits d’argane transformés, il est à souligner qu’une coopérative transforme en moyenne 10,7 tonnes de fruits d’argane par an. Ces coopératives s’approvisionnent auprès les divers acteurs de la chaîne, et principalement auprès des ménages adhérents qui leurs fournissent plus de 54 % des fruits.

Les relations commerciales entre les coopératives et leurs fournisseurs sont essentiellement informelles. Seule 5 % des coopératives affirment disposer de contrats d’approvisionnement. Par ailleurs, le choix de ces fournisseurs est tributaire de la qualité des produits, de la disponibilité des produits en quantité suffisantes, du niveau des prix et de la proximité. En ce qui touche le paiement, il est principalement effectué au moment de l’achat. Toutefois, certaines coopératives peuvent recourir au paiement à crédit ou un paiement différé.

Dans l’exercice de leurs activités, plusieurs contraintes ont été mises en évidence par les coopératives de la zone. Il s’agit principalement des difficultés d’approvisionnement en fruits et du manque d’entente entre les coopératives sur les prix d’acquisition de ces fruits.

Les commerçants ou intermédiaires

Il existe environ 200 commerçants/intermédiaires dans la province de Tiznit intervenant sur l’ensemble de la chaîne de valeur de l’argane. Leur répartition dans la province est très inégalitaire. Le cercle de Tiznit rassemble environ 60 % des commerçants, contre seulement 22 % et 18 %, respectivement pour les cercles de Tafraout et Anezi.

Par ailleurs, ces commerçants jouent un double rôle. Ils sont à la fois acheteur et revendeur des fruits d’argane et d’amandons. En effet, Ils achètent, en amont de la chaîne, les fruits d’argane auprès des ménages et les revendent sur le marché à d’autres ménages, coopératives et autres commerçants. A l’issue de la transformation primaire des fruits d’argane, ils achètent également des amandons, principalement auprès des ménages (70 %) qu’ils revendent sur le marché.

Certains commerçants se livrent à des activités de production, en transformant une partie des fruits d’argane en amandons, en vue d’accroître leur valeur ajoutée. Cette activité de transformation reste, toutefois, très discrète et peu connue des autres acteurs de la chaîne.

Les relations commerciales entre les commerçants et leurs fournisseurs (ménages ou autres commerçants) ainsi que clients (ménages, coopératives et autres commerçants), se font de manière informelle. Les critères de choix des fournisseurs dépendent essentiellement de la disponibilité des produits, les prix, la qualité des produits et la proximité des fournisseurs.

La transformation secondaire, l’extraction de l’huile est la seconde opération de transformation réalisée au niveau «Intermédiaire» de la chaîne de valeur de l’argane. Elle consiste à transformer les amandons résultant du dépulpage des fruits et concassage des noix d’argane, ou achetés auprès d’autres acteurs de la filière, pour obtenir de l’huile d’argane alimentaire et/ou cosmétique (produits). En ce sens, les tourteaux obtenus suite au pressage de la pâte d’argane sont considérés comme des sous-produits.

Cette opération se déroule techniquement en plusieurs étapes: la torréfaction des amandons (pour l’huile d’argane alimentaire), le broyage/mouture, le malaxage/pressage et enfin la décantation et filtration de l’huile obtenue.

Les principaux acteurs qui opèrent sur ce maillon sont les ménages et les coopératives. En effet, les ménages de la province de Tiznit produisent exclusivement de l’huile d’aragne de consommation. Dans ce cadre, il est à signaler que seulement 39 % de ces ménages intervenant dans la chaîne de valeur de l’argane, vont au bout du processus, en produisant eux-mêmes leur huile. Les coopératives, quant à elles, produisent à la fois de l’huile d’argane alimentaire (représentant le quart des huiles produites) et cosmétique.

Activité 3: la commercialisation

Cette activité correspond aux opérations de conditionnement et de commercialisation des huiles produites par les ménages et les coopératives et celles achetées par les commerçants auprès des producteurs, précités. Ce maillon de la chaîne fait intervenir, en plus de ces trois acteurs, un quatrième participant qui est le Groupement d’Intérêt Économique (GIE).

Les ménages conditionnent et commercialisent eux-mêmes l’huile d’argane qu’ils produisent et procèdent à la vente directe aux particuliers. Ces ménages n’adhèrent généralement à aucune coopérative ou groupement, et ne passent pas par des intermédiaires pour la vente de leurs produits.

Pour les coopératives, la majorité conditionne elle-même sa production d’huile d’argane. Certaines le font, cependant, à travers les GIE, auxquelles elles sont affiliées. 82% des coopératives de la province disposent de leurs propres points de vente, situés au sein de leurs sièges. Ces points ne sont généralement pas facile d’accès et ne constituent pas une réelle opportunité de vente des produits. En ce qui est des relations commerciales avec les clients, elles sont généralement informelles (seul 5,6 % des coopératives affirment avoir entretenu des contrats). Les clients des coopératives résident au niveau local, national et même international. Le tableau 3 montre le part des ventes consacrées à chaque type de clients.

Il est à noter qu’il existe deux groupements dans la province, composés de la moitié des coopératives d’argane de la zone, auxquelles, ils offrent des services de soutien nécessaires pour le conditionnement, la valorisation et la commercialisation de leurs produits. Le GIE représente un débouché pour les produits des coopératives membres, vu qu’il les présente dans les salons internationaux et les différents marchés qu’il fréquente. Cependant, ce type de partenariat engendre certaines contraintes liées à la faiblesse des quantités de produits commercialisés à travers les GIE et la faiblesse des prix de vente.

En ce qui est des commerçants, ils vendent la majorité des huiles aux particuliers. A ce niveau, deux catégories de commerçants sont à distinguer en fonction de leur capacité d’approvisionnement et de commercialisation.

Par ailleurs, il est à préciser que la quantité totale d’huile d’argane revendue par certains grands commerçants est supérieure aux quantités achetées. Ceci s’explique par le fait qu’ils mènent, de manière non déclarée, des activités de production d’huile d’argane au travers certains ménages. Le tableau 4 répartit les ventes d’huile d’argane par type de clients.

Source sur Revue Marocaine des Sciences Agronomique et Vétérinaires et ficher PDF
https://www.agrimaroc.org

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