8.3 C
New York
jeudi, mars 28, 2024

Buy now

Maladies parasitaires du mouton sur parcours

L’élevage ovin qui compte près de 14 millions de têtes assure des fonctions diverses aussi bien à l’échelle de l’éleveur qu’au niveau national.

Pour le propriétaire, il permet de valoriser la main d’oeuvre familiale à coût d’opportunité nul, d’assurer un revenu appréciable et une source de liquidité parfois unique pour la famille, d’accumuler un capital nécessaire à la réalisation d’autres projets (construction de maisons, achats de terre) et couvrir les besoins urgents (maladie, scolarisation, mariage). Le mouton continue enfin de jouer un rôle socio-religieux en procurant des animaux à abattre ou à offrir pendant les fêtes religieuses ou familiales.

Télécharger

A l’échelle nationale, l’élevage du mouton constitue une réserve de génotypes variés et adaptés. Il valorise une source végétale naturelle, gratuite et de bonne valeur nutritive, difficilement exploitable par les autres espèces. Sur le plan socio-économique, ce type d’élevage limite l’exode rural, dynamise le marché, alimente et constitue une source importante de protéines et de productions annexes. En effet, le cheptel ovin produit environ 78.750 tonnes de viande par an, couvrant environ près de 32% de la consommation totale en viande et près de 12.000.000 de toisons par an.

Cependant, ce type d’élevage traditionnel extensif dans sa presque totalité se trouve fragilisé par son propre mode de conduite. Les contraintes sont nombreuses et les possibilités d’amélioration le sont aussi. Les difficultés que rencontre cet élevage et qui risquent de compromettre son développement sont liées au milieu naturel et humain, aux caractéristiques de conduite et d’alimentation et finalement aux contraintes sanitaires et hygiéniques. Parmi les contraintes sanitaires, le parasitisme constitue une dominante pathologique.

Importance des parasitoses ovines au Maroc

L’appréciation de l’incidence des parasitoses est particulièrement malaisée et ne peut avoir qu’une valeur indicative. On doit tenir compte des pertes directement causées par les parasites (mortalité, saisies), mais aussi des pertes indirectement entraînées par le parasitisme, qui constituent les pertes potentielles ou le manque à gagner. Les pertes économiques résultant de l’infestation parasitaire sont dues:

• à la mort des animaux les plus parasités. Les mortalités moyennes des brebis enregistrées dans différentes régions du Maroc ont atteint 11% et celles des agneaux 16%,

• aux avortements et troubles de la reproduction,

• aux mortinatalités ou naissances d’animaux chétifs à croissance plus lente,

• aux baisses de production: viande, lait  et laine,

• aux saisies totales ou partielles à l’abattoir.

Des investigations effectuées dans certaines régions du Maroc, ont mis en évidence l’impact zootechnique et économique des maladies parasitaires sur les productions ovines. Par exemple au Moyen atlas, la mortalité et la réduction des performances de reproduction des brebis, attribuées aux infestations parasitaires sont alarmantes (un taux de mortalité pouvant atteindre 24% chez les brebis et 30% chez les agneaux; 5% des avortements; une baisse de 12% du taux d’agnelage).

Parasitisme du mouton

Le mode d’élevage extensif qui a cours dans tout le pays expose le mouton à un polyparasitisme intense faisant de cet animal un « musée de parasites ». Environ 30 espèces, classées en parasites internes et externes se rencontrent avec une intensité variable selon les régions, les années et les saisons. Ce sont les nématodes digestifs, respiratoires qui sont communément plus à craindre. Sans doute, et en fonction des conditions, s’y ajoute la douve et les ectoparasites.

Le parasitisme est définit comme étant « celui qui s’est fait une habitude de manger chez autrui ou qui vit aux dépens d’autrui ». Ainsi, on comprend bien pourquoi et comment le parasite empêche le bon fonctionnement de l’organisme des animaux infestés. L’impact zootechnique et économique des maladies parasitaires sur les productions ovines comprend des pertes en nature, directement par mortalités, mais surtout des pertes insidieuses par amaigrissement, retard de croissance, baisse des performances reproductrices et aussi des pertes dues à l’engagement de moyens matériels et humains pour leur prévention.

Conditions favorisant l’apparition de maladies parasitaires du mouton

L’élevage extensif traditionnel pratiqué au Maroc signifie:

• Alimentation insuffisante et disette généralisée en période de soudure,

• Nécessité de déplacements fréquents des animaux pour aller chercher, quand elles manquent, l’eau et la nourriture,

• Augmentation du degré de contamination et de dispersion des éléments de dissémination parasitaire dans l’environnement,

• Médiocrité de  la  lutte  contre  les  maladies parasitaires.

Alimentation insuffisante et disette

Une alimentation insuffisante ou de mauvaise qualité affaiblit les animaux et réduit leur capacité à résister à l’infestation parasitaire. Dans la pratique, cette situation se traduit par une augmentation de l’infestation des animaux et par une détérioration plus grande de leur état de santé. L’accroissement de l’infestation réduit en effet encore plus la capacité des animaux à mieux utiliser le peu de nourriture dont ils disposent et le cycle parasitisme/sous-alimentation va en s’aggravant.

La perversité de l’effet parasitisme/malnutrition explique pour une large part la gravité des accidents observés au Maroc en période de disette. Le même phénomène explique le rôle de facteurs limitant la production, joué en élevage extensif par les parasites. En temps normal, un équilibre s’établit entre faible niveau de productivité et parasitisme du troupeau. La rupture se manifeste quand le cycle de production entraîne une augmentation des besoins alimentaires des animaux, c’est-à-dire pendant les périodes sensibles:

• avant la lutte,
• avant la mise-bas,
• pendant l’allaitement.

Pendant les périodes sensibles, l’effet pervers parasitisme/malnutrition conduit au déséquilibre et place le parasitisme en situation de facteur limitant, si l’éleveur n’intervient pas.

Nécessité de déplacements des animaux

La nécessité de déplacements fréquents du troupeau pour aller chercher l’eau ou la nourriture quand elles manquent affaiblit les animaux et augmente leur sensibilité à l’infestation. De plus, et dans la quasi-totalité des cas, déplacement vers l’eau ou la nourriture signifie contact avec d’autres troupeaux et passage par des zones de hautes infestations. Les points d’eau, les pâturages plus humides, les zones à forte densité animale, sont de hauts lieux de contamination parasitaire. Les troupeaux trouvent de l’eau et de la nourriture, certes, mais s’infestent en contrepartie.

Augmentation du nombre de troupeaux sur les parcours

Le phénomène est là, quasi-mathématique. Chaque animal, par les œufs et les larves qu’il excrète dans ses excréments, est de fait un multiplicateur de parasites. L’augmentation de la charge à l’hectare augmente de façon mécanique à la fois le nombre d’éléments contaminants par mètre carré et les chances pour les ovins de se contaminer quand ils avalent de l’herbe.

Médiocrité de la lutte antiparasitaire

L’intérêt de la prévention antiparasitaire n’est pas perçu par les éleveurs de la même manière. Une catégorie croit encore au vieil adage « occupe-toi de tes moutons (c’est-à-dire donne-leur à manger) et ils s’occuperont de leurs parasites », ne pratiquent aucune intervention curative ou préventive. D’autres sont conscients de l’intérêt d’une prophylaxie mais sont découragés devant le coût des produits antiparasitaires, surtout que les gros frais sanitaires doivent être engagés en automne-hiver (saison de forte charge parasitaire), période de disette au cours de laquelle la trésorerie des éleveurs est au plus bas. Enfin, il y a des éleveurs qui pratiquent une prévention avec excès et anarchie: c’est la catégorie des éleveurs à seringue. Les efforts de contrôle du parasitisme entrepris par les meilleurs éleveurs à l’initiative de l’état ou ceux encadrés par les vétérinaires privés et l’Association Nationale Ovine et Caprine (ANOC) ne peuvent avoir, dans ces conditions, que des effets ponctuels.

Principales maladies parasitaires du mouton

Suivant la cause, les maladies parasitaires sont classées en deux grands groupes: les parasitoses internes et externes.

Maladies parasitaires internes

Les parasitoses internes sont les principales maladies du mouton, elles dominent la pathologie causant à l’élevage de lourdes pertes. Parmi celles-ci figurent:

Strongyloses gastro-intestinales Lghoch; Misdid-Iserman)

Elles sont dues à des parasites ronds présents à divers niveaux du tube digestif (caillette, intestin grêle, gros intestin). Le cycle de vie de ce groupe de parasites est sensiblement le même; les vers adultes mâles et femelles, après accouplement, pondent des œufs qui passent via les excréments dans le milieu extérieur. Sur le pâturage les œufs pondus donnent naissance à des larves si les conditions climatiques (humidité et température) sont favorables. Les larves infestantes sont ensuite ingérées avec l’herbe par le mouton.

Les symptômes sont à peu près communs à tous les strongles digestifs. L’évolution est généralement chronique, plus rarement aigue. Le tableau clinique est dominé par le syndrome de gastro-entérite, se traduisant par une diarrhée sévère souillant l’arrière train, incoercible et s’accompagnant d’un état de déshydratation très accusé. Les mortalités sont fréquentes chez les agneaux âgés de plus de 3 mois. Le plus grave est le parasitisme latent insidieux qui est à l’origine du retard de croissance des agneaux et de la baisse des performances de production et de reproduction des moutons adultes.

Les strongyloses digestives apparaissent de manière saisonnière, avec des variations selon les régions et les années, à cause de l’irrégularité et de la diversité du climat (humide au nord; aride au sud et sub-humide et semi-aride au centre) dont dépend intimement le développement des parasites sur les pâturages. Globalement, les périodes de fortes infestations se situent le plus souvent en automne et parfois en hiver dans les régions à climat tempéré (cas du Rif). Malheureusement, cette période coïncide avec celle des disettes alimentaires et de stress thermique (froid) et physiologique (agnelage et lactation). Dans les zones steppiques (cas de l’oriental), l’explosion parasitaire a lieu après les premières pluies d’automne ou d’hiver. Dans les zones arrosées au printemps, une deuxième période de forte infestation est à craindre bien qu’elle est souvent masquée par l’alimentation favorable à ce moment. Les intempéries orageuses d’été constituent un catalyseur d’activation de parasitisme pouvant être intensif et mortel. Les mortalités consécutives sont souvent attribuées par l’éleveur aux prises d’eau de pluie retenues dans les flaques d’eau.

Strongyloses pulmonaires Riya; Misdid-Nourin)

Appelées aussi broncho-pneumonies vermineuses, elles sont dues à deux groupes de vers ronds à morphologie et à épidémiologie distinctes. Certains parasites sont localisés dans la trachée et les bronches (Dictyocaules), d’autres se trouvent dans les bronchioles et les alvéoles (Protostrongles). Les protostrongles font intervenir des mollusques terrestres (escargots ou limaces) comme hôtes intermédiaires pour leur développement. Le mouton s’infeste en ingérant les mollusques infestés avec l’herbe. Les Dictyoacaules ont un cycle de développement simple similaire à celui des strongles digestifs. L’infestation du mouton se fait par ingestion directe des larves avec l’herbe.

Le symptôme majeur est la toux qui est générée d’abord par l’irritation des voies respiratoires par les parasites et ensuite par les complications microbiennes. L’atteinte par les strongyles pulmonaires coïncide généralement avec celle due aux parasites digestifs.

Fasciolose (Fartout; Aferslam)

Fasciloa hepatica, 3 cm de long sur 1 cm de large, plate, ravage le tissu hépatique et les canaux biliaires. L’ovin atteint présente au début les symptômes généraux du parasitisme et meurt dans une grande misère physiologique. Contrairement au bovin, chez lequel la fasciolose évolue sous une forme chronique, le mouton est très sensible et la migration des parasites dans le tissu hépatique provoque des hémorragies importantes et mortelles. A côté des pertes par mortalité, les saisies au niveau des abattoirs de foies lésés par la douve sont considérables.

La fasciolose ovine est très répandue dans les régions où les animaux peuvent pâturer en contact avec des milieux aquatiques tels les fleuves, les oueds, les ruisseaux, les sources, les canalisations et toute retenue d’eau; ceci est en relation avec la biologie du parasite qui nécessite un mollusque amphibien « limnée » pour effectuer son développement.

Globalement, la fasciolose animale, connue aussi sous le nom de la douve, se déclare en deux périodes: en fin printemps et en automne.

Moniezia (Sinta)

Connue aussi sous l’appellation de taeniaisis, elle constitue une des dominantes pathologiques chez l’agneau. Le parasite responsable appelé Moniezia est un ver plat en forme rubanée; vit dans l’intestin grêle du mouton et peut atteindre 6 mètres de longueur. Les anneaux mûrs contenant les œufs embryonés sont rejetés dans les milieux extérieurs avec les excréments où ils peuvent apparaître sous forme de « grains de riz » tapissant la zriba ou la bergerie, souvent suite au traitement. La lyse de ces anneaux libère des œufs qui seront ingérés par un hôte intermédiaire indispensable au développement: l’oribate. Ces acariens coprophages de 1 mm de long vivent sur le sol ou sur l’herbe particulièrement dans les prairies humide, acides et riches en humus. Le petit ruminant s’infeste en absorbant l’acarien porteur de la larve.

Les animaux atteints présentent une anémie lente et progressive, de l’adynamie et des troubles digestifs avec alternance de constipation et de diahrrée et rejet d’anneaux dans les excréments. La monieziose entraîne également des retards de croissance voire de l’amaigrissement. Le taeniasis apparaît chez l’agneau au printemps et l’accompagne, en dehors du traitement, tout au long de sa croissance.

Cestodoses larvaires

Ce sont des maladies parasitaires transmises au mouton par le chien. Ce dernier héberge trois taenias adultes qui se développent chez le mouton sous forme larvaire à savoir l’hydatidose, la cysticercose hépato-péritonéale et la cénurose cérébro-spinale. Dans ces trois cas, le chien parasité par trois espèces de taenias adultes élimine dans le milieu extérieur des anneaux mûrs de taenia qui libèrent des œufs. Le mouton s’infeste en ingérant ces œufs avec l’herbe souillée.

Les cestodoses larvaires sont contractées au pâturage. La cohabitation sur les prairies de petits ruminants et de chiens est favorable au cycle évolutif de ces affections. Les chiens éliminent les formes infestantes pour les petits ruminants et ils s’infestent eux même par la consommation de viscères parasités de ruminants.

Hydatidose ou Maladie du kyste hydatique (Nbail; Oufoughen)

Cette maladie constitue un problème de santé public majeur puisqu’elle est commune à l’homme et aux animaux. Elle se manifeste par la présence de kystes localisés essentiellement dans le foie et les poumons. Ces kystes sont remplis d’un liquide clair sous pression qui augmentent de taille avec l’âge de l’animal. Le taux d’infestation des jeunes par la maladie atteint 50%; celui chez les brebis dépasse 90%.

Coenurose (Jnoun; Tiwigla)

Cette maladie est due à la localisation dans les centres nerveux du mouton de vésicule flasque contenant la larve de coenure appelée Coenurus cerebralis. Cette vésicule exerce une pression sur les tissus nerveux et entraîne des troubles locomoteurs avec déplacement en cercle « tournis », station debout difficile, paralysie et attitudes particulières comme flexion de la tête sur l’encolure « tête encapuchonnée » ou en arrière « cingleur ».

Maladies parasitaires externes

Les parasites externes du mouton sont essentiellement représentés par les acariens (agents de gales), les poux et les larves de mouches (agents de myiases cavitaires). Ils sont responsables de pertes économiques importantes par des retards de croissance, des lésions de la peau et de toison et même de la mortalité. Ces affections sont contagieuses, parfois transmissibles à l’homme.

Gales (Jerba; Aguejid)

Le mouton développe deux types de gales qui sont classées comme maladies contagieuses:

• La gale sarcoptique ou gale de la tête, appelée aussi « noir museau » et
• La gale psoroptique ou gale du corps.

Gale psoroptique provoquée par l’acarien Psoroptes ovis est très contagieuse. L’introduction dans une bergerie d’un seul individu galeux, souvent par l’introduction de béliers améliorateurs, peut être la cause d’une grave contagion touchant plus de 80 % de l’effectif de troupeau, surtout en hiver lorsque les animaux vivent les uns sur les autres, enfermés dans des locaux réduits. L’agent de gale de taille microscopique, agresse la peau et provoque un prurit intense. L’animal perd la plus grande partie de sa toison. La mortalité peut survenir suite à une misère physiologique.

Gale sarcoptique est beaucoup plus rare que la précédente. L’acarien Sarcoptes scabei affecte les parties dépourvues de laine, notamment la tête. Les animaux malades se grattent jusqu’au sang, s’écorchent, s’arrachent les téguments. La tête n’est plus alors qu’une vaste plaie plus ou moins foncée d’où le nom de « noir museau ». En même temps, les extrémités des membres sont atteintes.

L’une ou l’autre des gales peut atteindre le scrotum du bélier et compromettre sa fertilité. Les lésions entraînées par le grattage et les surinfections microbiennes qui s’en suivent, peuvent perturber le contrôle de la température testiculaire et par conséquent l’endommagement de la formation des spermatozoïdes.

Autres parasitoses externes

Essentiellement représentées par les poux, les mellopahges et les tiques. La phtyriose connue localement par « Gmel » est fréquente chez les jeunes animaux au cours de l’hiver. Les espèces responsables sont soit de faux poux ou poux broyeurs (Mallophages) ou de vrais poux qui vivent du sang de l’animal. Le mellophage, Mellophagus ovinus, est aussi un ectoparasite dominant en hiver. Une mauvaise croissance, l’anémie et le grattage sont les signes dominants.

L’infestation par les tiques est courante en été. Les espèces en cause sont surtout Rhipicephalus sp qui sont des spoliateurs de sang mais surtout des vecteurs de piroplasmose (Bouseffir) ovine.

Oestrose (Douda d’arass)

Cette maladie est provoquée par le cheminement dans les cavités nasales et les sinus du mouton de larves d’une mouche Oestrus ovis. L’invasion des muqueuses nasales par les larves pondues au voisinage des narines provoque des signes d’excitation et d’irritation importants: l’animal éternue, secoue la tête, s’arrête fréquemment de pâturer. Les larves mûres sont éliminées spontanément des cavités nasales lors des éternuements, au bout de 8 à 10 mois.

Les moutons s’infestent en fin de printemps et en automne. Les animaux atteints manifestent des retards de croissance et des diminutions de production.

Diagnostic parasitaire

Il est capital de diagnostiquer le plus rapidement possible une maladie parasitaire car les parasites, surtout internes, sont responsables de lourdes pertes économiques en élevage.

C’est donc au praticien de rechercher toutes les méthodes qui lui permettront d’affiner son diagnostic afin de conseiller le meilleur moment et la meilleure technique d’emploi des antiparasitaires les plus spécifiques dans les conditions considérées.

Il est donc important d’établir le diagnostic de maladie parasitaire avant un traitement curatif ou préventif.

Le diagnostic de maladie parasitaire interne peut reposer sur quatre types de considérations qui ne s’excluent pas mais qui se complémentent:

• Considérations épidémiologiques
• Considérations cliniques
• Considérations nécropsiques
• Résultats d’examen de laboratoire.

Le diagnostic épidémiologique

Une première approche du diagnostic de maladies parasitaires est l’étude de leurs conditions d’apparition. Le praticien doit s’enquérir des problèmes présents dans l’exploitation affectée, s’informer sur les catégories d’animaux touchés, les conditions d’élevage et d’environnement et connaître les risques parasitaires en fonction des conditions locales.

Le diagnostic clinique

Avant d’envisager l’aide que pourra apporter le laboratoire, il est indispensable de rappeler que le diagnostic, par définition même, est d’abord basé sur la connaissance des symptômes. Dans la majorité des cas, on cherche à établir le diagnostic sur le terrain sans avoir recours au laboratoire.

L’observation clinique est le premier moyen dont dispose le praticien pour établir son diagnostic. Dans les maladies parasitaires internes des animaux d’élevage, deux grands syndromes dominent:

Le syndrome entéritique

L’apparition de diarrhées doit toujours faire suspecter l’existence d’une affection parasitaire. En élevage, les infestations parasitaires ont souvent une expression clinique atténuée. A la faveur du stress, tels que la sous alimentation et surtout la mise-bas, éclatent des phases cliniques dont l’origine reste souvent incertaine.

Le syndrome pulmonaire

Classiquement les broncho-pneumonies vermineuses des ovins se traduisent par l’essoufflement, la toux et la dyspnée frappant les jeunes et les adultes à l’herbe. En plus de ces signes, il y a un amaigrissement rapide. Cette association de symptômes permet, dans la plupart des cas, au vétérinaire de poser son diagnostic.

D’une manière générale, une approche clinique rationnelle, associée à une bonne connaissance des conditions locales d’élevage, des antécédents pathologiques de l’exploitation et des conditions d’apparition des symptômes doivent permettre au praticien de prescrire une thérapeutique judicieuse et de mettre en place des mesures sanitaires appropriées.

Le diagnostic nécropsique

L’existence d’une maladie parasitaire peut éventuellement être mise en évidence lors de l’autopsie de l’animal par la recherche de lésions crées par les parasites localisés dans les organes; la plupart sont de petite taille, à la limite de la visibilité et leur recherche ne peut être réalisée qu’en laboratoire spécialisé.

Le diagnostic de laboratoire

Les difficultés du diagnostic différentiel des maladies des animaux d’élevage justifient l’emploi de méthodes d’examen au laboratoire, pouvant permettre de mettre en évidence la présence de parasites et de les identifier. Le praticien devra interpréter ces résultats pour évaluer le rôle de ces agents dans les manifestations pathologiques observées.

Ces techniques d’examens de laboratoire peuvent se regrouper en:

Méthodes coprologiques

• Coproscopie: recherche des œufs et des larves dans les matières fécales.

• Coproculture: permet l’identification des parasites par l’observation des formes larvaires caractéristiques après mise en culture des œufs. Ces méthodes sont les plus utilisées.

Méthodes biochimiques

Dosage dans le sang de substances biochimiques pouvant traduire la présence de parasites chez l’hôte.

Méthodes hématologiques

Mise en évidence de modifications des éléments sanguins (anémie, éosinophilie) ou présence de parasites (piroplasmes).

Méthodes immunologiques

Mise en évidence des anticorps résultant de la présence de parasites (corps étrangers dans l’organisme).

Lutte contre les maladies parasitaires

La pathologie ovine est dominée par l’importance des parasitoses. Une lutte antiparasitaire rationnelle devra permettre l’augmentation de la rentabilité de l’élevage. En présence d’un troupeau de petits ruminants exposés aux infestations parasitaires on doit agir sur les animaux, l’environnement (les pâturages et les locaux), le système d’élevage et l’alimentation.

Action sur les animaux

L’action sur les animaux, pour être efficace, doit être:

Générale: le traitement antiparasitaire doit être appliqué à l’ensemble des animaux d’un troupeau. Il portera sur tout l’effectif, sains comme malades, vieux comme jeunes.

Précoce: pour éviter que les animaux ne deviennent gravement malades et surtout qu’ils n’aient le temps d’ensemencer le milieu extérieur,

Répétée: car les médicaments antiparasitaires n’ont pas de rémanence. Le rythme des traitements sera fonction de la biologie des parasites en cause, des conditions climatiques et d’élevage.

• Faite au bon moment pour être efficace et rentable. Pour cela, les études épidémiologiques régionales sont indispensables. Elles permettront de connaître au niveau de chaque région les différentes espèces parasitaires présentes, leurs fluctuations saisonnières, base nécessaire à la réussite de toute action prophylactique contre les parasitoses des petits ruminants. La survie et la vitesse de développement du parasite dépendent des conditions climatiques (température, humidité, ensoleillement). Un ou plusieurs hôtes sont nécessaires au déroulement du cycle (nématodes respiratoires, douve, taenia etc..). Cette interaction entre le parasite et son milieu environnant est très complexe au Maroc, pays caractérisé par un climat diversifié.

A titre d’exemple, mais non généralisable, on peut proposer pour une région à climat tempéré (pluviométrie supérieure à 600 mm par an et répartie sur l’automne, l’hiver et le printemps) le calendrier de prévention suivant:

Cas des parasitoses internes

• Un traitement en automne (octobre-novembre) destiné à éliminer les nématodes digestifs, pulmonaires, la douve du foie et les oestres.

• Une intervention de fin hiver-début printemps (février-mars) qui permettra d’éliminer les nématodes digestifs et respiratoires des brebis et les taenias des agneaux.

• Un traitement de fin printemps dirigé contre la douve chez les moutons ayant séjourné sur pâturage à risque et l’oestrose qui est fréquente au cours de cette saison.

• Un traitement d’été qui ne suscite pas l’enthousiasme de l’éleveur car en cette période les animaux sont bien nourris et le niveau parasitaire est faible mais dont l’intérêt préventif à moyen terme est essentiel. Ce traitement éliminera la population parasitaire résiduelle chez les animaux et les conditions climatiques d’été (fortes températures et humidité basse) agiront sur les formes parasitaires contaminantes (œufs et larves) des pâturages.

Cas des parasitoses externes

La lutte contre les parasites externes (agents de gales, les poux et les tiques) doit tenir compte, en plus de l’application des acaricides, de l’amélioration des conditions alimentaires et surtout hygiéniques. Ces maladies sont à craindre particulièrement en hiver lors de la rentrée des ovins en bergerie où leur promiscuité est augmentée et la contagion accrue. La concentration des troupeaux lors de la transhumance et autour des points d’eau en été est aussi un facteur favorisant. Ces mesures doivent être complétées par l’application d’acaricides, au moins deux fois par an, la première après la tonte et la deuxième au mois d’août. Les méthodes courantes d’application d’acaricides chez les moutons sont:

• la balnéation en bain acaricide permet de traiter de grands effectifs. Son inconvénient est le coût de construction et de l’entretien du bain.

• La pulvérisation d’acaricides sur les animaux est une pratique à laquelle on fait appel pour traiter de petits effectifs contre les tiques, les poux et les larves de mouches. Son efficacité est par contre très limitée pour le traitement des gales.

Du point de vue curatif, les agents de gales et les poux qui apparaissent en hiver ne peuvent être combattus par balnéation à cause des risques de refroidissement d’où le recours à l’administration de produits injectables (avermectines et milbémycine).

Produits antiparasitaires

Les différentes études menées au Maroc concernant le parasitisme des petits ruminants ont montré l’existence d’un polyparasitisme dont le contrôle doit se baser sur l’utilisation de produits antiparasitaires (tableau 1 et 2).

Ces produits guérissent les animaux malades, améliorent les performances des animaux infestés et préviennent l’apparition d’une maladie. Cependant il faut noter que si la thérapeutique antiparasitaire permet à l’heure actuelle de lutter efficacement contre les parasites des animaux, elle ne peut cependant arriver à des résultats intéressants que si le vétérinaire conseille l’éleveur dans l’emploi de ces armes mises à sa disposition. Leur emploi, dans les programmes de prévention, doit être raisonné; il faut les utiliser à la période où ils sont le plus utiles et où leur efficacité sera maximale afin de limiter le coût global de la prévention.

Action sur l’environnement

Ce sont des actions qui visent à diminuer les risques d’infestation en intervenant sur la phase externe du cycle évolutif des parasites, c’est-à-dire sur les œufs, les larves libres ainsi que sur les hôtes intermédiaires. Les solutions réalistes consistent à:

• soustraire les animaux du milieu contaminé,

• diminuer la densité animale mise sur les parcours,

• instaurer le système de la rotation des prairies. C’est une méthode qui consiste d’abord à délimiter des parcelles puis les abandonner pendant une période assez longue pour que la plupart des œufs et de larves aient succombé, soit environ deux mois pour les nématodes digestifs. La rotation des prairies a aussi l’avantage de permettre la régénération de la flore pastorale. Quoi que difficile à réaliser, à cause du caractère collectif des pâturages, l’information des éleveurs et leur encouragement à la mise en défens temporaire des terres collectives autogérées par les tribus bénéficiaires, constituerait une solution adaptée.

• lutter contre les hôtes intermédiaires, essentiellement les mollusques amphibiens (les limnées, vecteurs de la douve), par le drainage des eaux stagnantes et l’épandage de substance molluscicides. Le ramassage des mollusques terrestres gastéropodes constituerait une méthode convenable de prévention contre l’infestation par les petits strongles respiratoires. La lutte contre les parasitoses transmises par les chiens peuvent être évitées par le traitement antiparasitaire de chiens atteints de taeniasis et vivant au contact des petits ruminants.

• garder les animaux 15 minutes sur un terrain sans herbe, à la sortie de la bergerie, pour leur permettre d’éliminer leurs excréments.

• garder les animaux 24 heures à la bergerie après un traitement contre les strongyloses digestives et pulmonaires, puis sortir les fumiers qu’on met en tas à l’extérieur

• éviter de répandre les fumiers non fermentés.

• traiter tous les animaux avant le départ pour la transhumance et au retour par un antiparasitaire à large spectre d’activité.

Voir le fichier PDF pour les illustrations

Par
Prof. Boumediane BERRAG
Docteur Vétérinaire
Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II

Activités du projet ConserveTerra

Articles à la une

error: