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vendredi, mars 29, 2024

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Conduite alimentaire de la vache laitière

La production de lait au Maroc a triplé au cours des trente dernières années, atteignant actuellement environ 1,2 milliards de litres/an. Cette augmentation est plus due au changement opéré au niveau de la composition génétique du troupeau bovin que par les efforts d’amélioration des autres facteurs de production, dont l’alimentation.

A ce titre, aujourd’hui, plus que jamais, nos éleveurs devront optimiser l’alimentation du cheptel, plus particulièrement des vaches laitières, pour perdurer dans le secteur laitier. En effet, si on considère deux intrants importants dans la production laitière, à savoir les aliments concentrés et le carburant pour la production fourragère et les travaux divers, on s’aperçoit que les ratios “Prix du lait/Prix des aliments” et “Prix du lait/Prix du carburant” ne cessent de diminuer ces deux dernières décennies, indiquant que le contexte économique est de plus en plus contraignant pour les éleveurs laitiers.

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C’est pour dire que l’amélioration de l’itinéraire technique de la production laitière est une priorité. Le présent bulletin vise à apporter quelques éléments qui contribueraient à aider l’éleveur à mieux gérer l’alimentation de la vache laitière.

Nous considérons qu’au Maroc, une attention particulière doit être portée sur la phase “Tarissement – Pic de lactation”, car le suivi de certains élevages montre que le pic de lactation est très souvent bien en dessous du potentiel des vaches, ce qui grèverait la production de toute la lactation et même les performances de reproduction.

Période de tarissement

Durant cette phase, on veillera à couvrir les besoins d’entretien de la vache, permettre une croissance adéquate du foetus et, assurer une bonne préparation au vêlage et à la lactation suivante. En cette période, on remarque une diminution de l’appétit des vaches qui atteint son minimum dans la semaine du vêlage.

L’objectif à se fixer en ce moment est de permettre aux vaches d’atteindre un bon état corporel au vêlage pour qu’elles expriment correctement leur potentiel. Les réserves corporelles sont indispensables pour faire face aux déficits énergétiques importants du début de la lactation. Globalement, au niveau d’un troupeau, les vaches doivent vêler à une note de:

 3,5 à 4,0 pour les troupeaux à haut potentiel (plus de 6 000 litres par vache laitière et par lactation);
 3,0 à 3,5 pour les autres troupeaux.

Des vaches en état insuffisant au vêlage, (moins de 3) sont pénalisées au niveau de leur pic de lactation.

Donc, le raisonnement de l’alimentation en période de tarissement dépendra de l’état corporel ciblé pour le vêlage. Une vache laitière, bonne productrice a besoin d’au moins 4 à 5 mois pour la reconstitution de ses réserves corporelles.

La reconstitution des réserves doit donc commencer dès le milieu de la lactation. Le reconditionnement de la vache en ce milieu-fin lactation est plus avantageux qu’en période de tarissement en raison de la meilleure efficacité de transformation énergétique (75 vs. 58% respectivement). Les vaches amaigries par leur lactation (note inférieure à 3) doivent impérativement reprendre de l’état, sinon la lactation à venir pourra être pénalisée.

Les vaches grasses au tarissement (note supérieure à 4) n’ont plus besoin de grossir. On peut éventuellement les rationner mais il est impératif de respecter la couverture de leurs besoins d’entretien et de gestation. En effet, tout amaigrissement pendant la période sèche accroît les risques de vêlage difficile et de non délivrance.

Il est bien évident qu’il est impossible de raisonner une telle conduite vache par vache mais le rationnement global à appliquer au troupeau devra tenir compte de ces quelques règles.

Ainsi, pour éviter l’amaigrissement des vaches taries, la ration doit couvrir au minimum les besoins d’entretien et de gestation, soit l’équivalent de l’entretien plus 7 kg de lait. Mais selon l’état de la vache au tarissement et de ses besoins de reprise d’état corporel, il est possible d’aller jusqu’à des apports équivalant les besoins d’entretien plus 12 kg de lait. Cela correspond à un apport de 8 à 10,5 UFL et de 700 à 900 g de PDI, le rapport PDI/UFL devant toujours être proche de 80 g de PDI par UFL.

L’alimentation minérale des vaches taries est très importante, c’est pendant cette période que la croissance du foetus est maximale et la vache doit continuer à reconstituer ses réserves minérales. Le minéral employé tiendra compte de la nature du régime pour le calcium et le phosphore et contiendra 4 à 5 % de magnésium. Cet élément joue en effet un rôle important dans le déroulement du vêlage, de la délivrance et de la mobilisation des graisses de réserves. Du sel sera laissé à la libre disposition des animaux.

En période estivale et automnale, un apport de vitamines A, D3 et E est indispensable. De l’eau doit être laissée à disposition des animaux.

A titre indicatif, le tableau 1 (voir fichier PDF) présente les apports recommandés (de l’INRA France) d’une vache laitière lors du dernier mois de gestation.

Pour préparer les vaches à consommer et à bien digérer les fourrages et les concentrés de lactation, il est recommandé de distribuer progressivement ces aliments au moins 3 semaines avant le vêlage pour que la flore ruminale puisse s’y adapter et que la transition puisse avoir lieu sans perturbation digestive.

La ration de base en période de tarissement peut être la même que celle de la lactation. La différence peut résider dans la quantité à distribuer qui augmentera après le vêlage. Si la ration de base est différente, on veillera à supplanter progressivement les fourrages de tarissement par ceux de la lactation, au moins 3 semaines avant le vêlage.

La quantité de concentré à distribuer avant le vêlage sera fonction de celle offerte au pic de lactation. Globalement, la vache recevra, quotidiennement, lors de la semaine pré-vêlage, presque la moitié de la quantité prévue en pic de lactation. Cette quantité distribuée avant le vêlage sera atteinte par augmentation progressive à un pas d’un kg par semaine.

Si la vache est isolée pour le vêlage, il ne faut pas oublier de l’alimenter en fourrage, en concentré et surtout en eau. Tout changement alimentaire réduirait à néant tous les efforts faits précédemment (transitions, préparation à la lactation) et serait néfaste au développement de l’appétit en début de lactation.

La gestion adéquate de l’alimentation durant cette période est aussi importante que durant la lactation. Durant la période de transition, certaines erreurs de la gestion de l’alimentation provoquent certaines complications lors du vêlage, à savoir:

 Syndrome de la vache grasse: En cas de suralimentation en fin de lactation et/ou durant la période de tarissement, la vache devient très grasse, et après le vêlage, elle perd beaucoup de réserve corporelle et son appétit est médiocre.

 Fièvre du lait: En cas de déséquilibre entre le calcium et le phosphore de la ration distribuée avant le vêlage, et plus particulièrement à un excès de calcium, la vache devient incapable de répondre à la grande demande en calcium en début de lactation. Elle est alors paralysée et peut même mourir si elle n’est pas traitée. La prévention de la fièvre de lait consiste à réduire les apports de calcium, une quinzaine de jours avant le vêlage, si les apports de l’ensemble de la ration dépassent largement les recommandations.

 Déplacement de la caillette: En cas de distribution excessive d’aliments concentrés, situation qui engendre un manque de fibres dans la ration, la caillette sera tordue et par la suite obstruée.

 Cétose ou acétonémie: C’est un désordre métabolique qui se produit chez les vaches qui ont un excès de réserves corporelles au moment du vêlage. Les graisses de réserve sont utilisées par les vaches hautes productrices lorsqu’elles ne disposent pas de suffisamment de glucose pour faire face à la production laitière. Ce processus d’utilisation des réserves de matières grasses génère une production de déchets: les corps cétoniques dont le représentant est l’acétone, ou le ß-hydroxybutyrate. Celui-ci peut être évalué dans les urines (cétonurie), dans le sang ou dans le lait avec des bandelettes réactives. L’acétone est produite par le foie, et ne peut être utilisée que par certains organes comme le coeur et dans une moindre mesure par le cerveau.

Les graisses de réserve produisent donc des déchets qui ont tendance à s’accumuler. Cette condition s’accompagne chez la vache d’une perte d’appétit et une diminution de la production laitière. L’animal maigrit et ses organes, notamment le foie, peuvent être endommagés de manière irréversible. C’est ce qu’on appelle la cétose.

Pour prévenir ce type de problèmes, certains recommandent l’utilisation de la choline protégée, à distribuer à raison de 60 grammes par jour, 3 semaines avant et 7 semaines après vêlage. Elle permet une amélioration du fonctionnement hépatique (moins de corps cétoniques et plus de glycogène), une réduction de la chute de poids vif après vêlage, et amélioration la production laitière qui peut atteindre 2 kg/jour, une amélioration des performances de reproduction (+8% de vaches gestantes; -10 jours écart vêlage/gestation).

Activités du projet ConserveTerra

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